mardi 27 octobre 2015

Créer de nouveaux espaces de liberté

Néolibéralisme globalisé et fascisme, une équation improbable ? Pas pour Roland Gori, qui aperçoit des similitudes entre les deux régimes : quand la démocratie libérale s’impose dans la viepolitique en « triant ce qui est ou non acceptable pour les institutions internationales de la finance et du commerce », et désavoue les souverainetés populaires et nationales ; quand « la policedes pensées et des comportements est assurée par les nouvelles formes sociales de l‘évaluation qui réduisent la notion de valeur à la conformité et au calcul » ; quand « la concurrence économique n’est qu’une manière de poursuivre la guerre par d’autres moyens »… on retrouve les trois caractéristiques principales du fascisme : parti unique, un contrôle social sévère et un expansionnisme guerrier.
« Il est plus facile d’employer le terme de fascisme pour désigner aujourd’hui les mouvements djihadistes hostiles au discours universaliste et rationaliste des Lumières que pour caractériserune civilisation matérialiste, utilitariste et rationaliste, propre à la mondialisation ».
Créer de nouveaux espaces de liberté
Pour Roland Gori, il s’agit alors de tirer les conséquences de ce discours technicien qui paraît irréversible. L’auteur propose de cultiver la biodiversité des langues pour lutter contre l’hégémonie culturelle du « globish » (contraction de « global english », une forme internationale d’anglais), cette nouvelle langue qui détruit, au nom de l‘efficacité technique de la fonctionnalité des entreprises, le caractère poétique de chaque langue.
Il souhaite également en finir avec les grilles d’évaluation qui ne tiennent compte que des résultats immédiats et quantitatifs à une époque où tout est tourné vers le futur au mépris de la mémoire, pour restaurer au contraire la valeur de la tradition et de l’histoire.
Face aux crises successives que produit ce néolibéralisme globalisé, « avec ses dispositifs de mise sous curatelle technico-financière des peuples et de leur souveraineté politique, les systèmes de terreur qu’il engendre, les politiques sécuritaires qu’il favorise », il faut savoir créer de nouveaux espaces de liberté. « Le temps presse, il est venu, de réinventer l’humanisme, sans hypocrisie, sans naïveté, sans bons sentiments dégoulinants, audacieusement ».

L’Individu ingouvernable, Roland Gori (Les Liens qui Libèrent, 352 pages, 22,50 euros).