En 1998, l’historien américain Daniel Jonah Goldhagen publiait Les Bourreaux volontaires de Hitler, ouvrage très critiqué par la communauté académique dans lequel il expliquait le génocide juif par un antisémitisme fondamental caractéristique de l’identité allemande.
Cette thèse soulevait un problème de taille dans un contexte politique marqué par ce qu’on a appelé la « concurrence des mémoires » : si la Shoah s’explique par la spécificité du cas allemand, est-il possible d’en tirer un enseignement plus général ? Pourquoi un jeune, dont les ancêtres habitaient hors d’Europe et ont éventuellement vécu d’autres drames majeurs bien moins abordés à l’école et dans les médias que la Shoah, devrait-il se sentir concerné ?
un même fondement
Journaliste, familier de toute la littérature historique consacrée au sujet, notamment celle des « nouveaux historiens » allemands auquel il a consacré un ouvrage en 2002, Dominique Vidal défend justement l’idée que les leçons à tirer de cet événement capital de l’histoire contemporaine sont universelles. Tout comme celles d’autres épisodes tels que l’esclavage, la traite négrière, les guerres coloniales…
Si le génocide juif est unique, c’est en ce sens qu’il n’a pas de précédent. Mais toutes ces histoires particulières ont un même fondement : l’idéologie de la supériorité d’une race (ou d’une « civilisation » ?) sur une autre. C’est à travers une réflexion sur ce dénominateur commun que ces expériences et ces mémoires peuvent se partager dans une perspective universelle.
Ce recueil d’articles écrits sur une quinzaine d’années, parfois très personnels, offre un éclairage à la fois accessible et solide sur ces questions.
Shoah, génocides et concurrence des mémoires, Dominique Vidal, Ed. du cygne, 122 p., 13 €